... récemment, à Paris, chez Gibert Jaune, j'ai trouvé un exemplaire du livre LETTRES A YVES (Gallimard), rédigé par le débutant littéraire plus très jeune mais, qui sait, potentiellement prometteur qu'est PIERRE BERGE. Il s'agit bien sûr d'un recueil de lettres écrites par Bergé à l'homme avec qui il a partagé sa vie pendant cinq décennies, et ce, après la mort de celui-là. Un beau geste, pourrait-on se dire. Certes, la lecture pourrait prendre son envol sur une légère note de méfiance, étant qu'on pourrait se demander, mais de telles lettres, si on ressent le besoin de les écrire, et ce serait tout à fait légitime, même touchant, pourquoi prendre la décision de les publier ensuite. Car il ne s'agit nullement d'une œuvre épistolaire spontanée, où les participants ont décédé, ont cessé de s'écrire pour une raison ou une autre, tout simplement. Non, le but de Monsieur Bergé semble consister à présenter au public (enfin bon : disons plutôt à la partie du public qui lira ce livre, on supposera pour faciliter l'affaire que c'est une partie négligeable des gens qui peuplent la planète, et tant mieux...) une espèce de monstre avec qui il a dû partager sa vie ? Il n'arrête de répéter à ces lecteurs, voire même, à l'homme qui est son interlocuteur principal et le protagoniste, combien celui-là a changé au fil des ans, comment il n'a arrêté de se détruire à force de prendre des drogues, de boire trop d'alcool, de s'abandannoer à des excès de bouffe, à la boulimie - tout cela, s'entend, pour importuner Monsieur Bergé et tous les gens qui l'entouraient. Ce livre-hommage, ne serait-il pas plutôt un geste de vengeance ? Il faut se poser la question ...
... et encore, puisqu'il s'y met, Monsieur Bergé n'oublie pas d'insister à plusieurs reprises sur le fait que, tout compte fait, son cher Yves aurait été choisi comme vrai successeur par Gabrielle Chanel, seul prétendant à son trône, à la position d'icône de la mode (française). Pas très subtil par l'auteur, mais bon, il atteint son but : nous avons compris que "K." occupe son poste actuel (et depuis bien trente ans désormais) à tort. Une possible explication, et veuillez avoir la gentillesse de me pardonner si je me perds dans les affres du commérage, se trouve dans la personne de "J. de B.", à qui s'était attaché de la plus passionnée des manières Yves à un moment donné, ce qui, ce n'est pas un secret, a gâché l'amitié qu'il y aurait eue entre Yves et K., tous les deux arrivés à Paris plus ou moins au même moment dans les années cinquante. Mais je suis en train de m'égarer : la seule chose qu'il me reste de dire, la voilà - à mon avis, si l'intention de Monsieur Bergé était de rendre une image aimable d'une personne aimée, il a échoué dans tous les sens possibles. Et puisqu'il est à supposer que Monsieur Bergé n'est pas une personne à échouer dans quel sens que ce soit, son intention a peut-être été une autre. Et cela, je ne le trouverais pas très beau, et à la fin du jour, même aussi gratuit que méchant et, pourquoi pas, niais ...
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